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Immobile

45 ans Paris 67
A la pleine journée comme à la nuit tombée,
Je vais seule cernée ou seule solitaire,
Frôlant du bout des doigts l'existence exaltée
D'autres à qui la chance n'a pas fait la guerre.

Intouchée  
par le vent et les grandes marées,
Immobile et posée, sombre comme la pierre,
Je contemple les hommes d'un regard figé,
Je contemple les joies, les bonheurs éphémères.

Et tout autour de moi, tout m'apparaît distant,
Caché sous un brouillard de souvenirs désuets;
Etourdissante danse, volée au néant,
D'images fatiguées et de cinglants regrets.

Et je suis enlisée dans des sables mouvants,
Un simple grain bloquant les rouages défaits
De mon corps réticent à aller de l'avant,
Perdu dans les visions de ce monde imparfait.

Mes os usés stagnent, pareils aux vieux fossiles
Et j'observe toujours, les yeux brillants d'envie,
Les gens marchant au loin; tout leur semble facile;
Ils s'en vont droit au but, la chance leur sourit.

Mais cette main tendue d'un destin indocile
A passé son chemin en me voyant ici,
Privant d'air cette flamme qui déjà vacille
Et s'éteindra bientôt sur les jours de ma vie...
B I U