Je vais me permettre de rajouter une petite histoire familiale, pour souligner le fait qu'on peut très bien se tromper sur les gens.
Avant de se marier avec mon grand-père, ma grand-mère était sa colocataire. Pour tout le monde c'était un type bien, honnête, droit, travailleur, bien élevé, etc. Bref, bien sous tous rapports.
Ils ont fini par avoir une relation. Elle a fini enceinte, et mariée avec lui parce qu'elle l'était (enceinte), comme ça arrivait souvent à l'époque.
Et puis les choses ont dégénéré. Il est devenu très violent, en mots comme en gestes. Mais elle n'en parlait à personne, bien sûr. Ça ne se faisait pas, et puis elle avait dû le mériter, et puis il travaillait beaucoup et était très fatigué, et puis c'était son mari, et puis elle avait honte... Elle, une femme si bonne et aimante.
Quand ma mère a été en âge de comprendre, elle s'est opposée à son père. Elle a protégé sa mère. Puis a tenté de lui faire comprendre qu'elle devait parler, se séparer de lui. Ma grand-mère a toujours refusé. Trop honte.
Ça a failli fonctionner une fois. Ils ont bien failli divorcer, mais elle s'est laissé convaincre, et puis c'était son mari, et il n'était pas si mauvais, etc.
Et, un jour, alors que j'étais enfant, le témoin ça a été moi. J'étais horrifiée. Ma mère les a encore séparés et m'a demandé d'appeler la police pendant ce temps.
En fait, elle a passé toute sa vie à se faire violenter physiquement ou non, jusqu'au bout. Tout ça parce qu'elle ne voulait pas parler, tout ça parce qu'elle avait honte et parce qu'elle ne voulait pas assumer de s'être autant trompée sur le compte de son mari.
Voilà. Je ne sais pas si ça peut t'aider à comprendre que tu n'as pas à avoir honte. En tout cas, moi ça m'a aidée à comprendre qu'on ne doit jamais avoir honte d'être victime.