Je vais partir d'un autre point de vue.
Enfant, et je parle là des alentours de mes dix ans, une nouvelle est arrivée dans la classe. Un peu ronde, un peu binoclarde, un peu pataude, un peu collante, un peu naïve. Et, en toute logique, aussi pestiferée.
Je me souviens l'avoir critiquée régulièrement. Et, plus encore, je me souviens de cette sensation oppressante et totalement nouvelle pour moi que quelque chose clochait. Que je ne me comportais pas comme je l'aurais du. Pourtant, j'étais sincèrement incapable de saisir mon erreur. Je suivais le troupeau, je disais ce qui était. Les blessures qu'elle a pu subir, il m'a fallu plus de deux ans pour les envisager.
J'en ai reparlé par la suite à d'autres élèves. Ceux-ci se souvenaient parfaitement avoir repoussé d'autres enfants durant les années collèges, mais des années primaires, ils ne se rappelaient que leurs propres souffrances. Cette petite fille rejetée n'était pour eux qu'un souvenir flou, et pas particulièrement culpabilisant.
De même, je me souviens avoir fait quelques remarques qui, sur le moment, n'était pour moi que l'occasion d'ouvrir ma grande bouche et d'entrer un peu dans le cercle inaccessible des adultes et qui, avec du recul, apparaissent totalement déplacées.
Alors oui, je suppose qu'un parent doit apprendre à l'enfant quand se taire. Mais saisir réellement le poids des mots (et leur pouvoir, hé.) me semble se faire assez tard.
Sinon. J'ai eu une période boulimique assez violente, dont toute ma famille se trouvait au courant. Mon petit cousin est un jour venu me dire "C'est vrai que tu te fais vomir?" Damn. Dans le coeur, chéri.