Bonsoir
Cela fait quelques semaines que je suis tarabustée par l'envie d'écrire mes doutes et mes inquiétudes ici... je vais me lancer, ça évitera que cela continue à tourner dans ma
tête. De plus, votre avis m'intéresse grandement.
Mes doutes tournent autour de l'acception de moi. Et autour de cette fichue peur de grossir.
Je trace rapidement mon parcours, peu différent de dizaines de personnes ici. Huit dix ans, dans le haut de la courbe, « il faut la surveiller cette enfant », déclare le médecin. Pif paf, régime léger, mais tendance à me consoler avec la nourriture (ambiance détestable à la maison, divorce des parents, etc.). Arrivée au début de l'adolescence, bien que potelée je ne suis pas franchement grosse mais vais très vite le devenir – quoi comme meilleure réponse aux agressions des autres enfants (sale grosse ! Le tas ! La truie ! L'intello ! La moche!) que... manger ? Arrivée à 18 ans et en obésité modérée, je me dis qu'il serait temps de faire un régime et de perdre du gras. Aussitôt dit aussitôt fait, à coup de régime maison je perds 25 kg. Sur un an ou deux j'en reprends dix. Je tire la sonnette d'alarme et mon copain de l'époque me suggère de faire dukan, à deux. Aussitôt dit aussitôt fait... je reperds mes dix kilos, plus 5 pour faire bonne mesure, sur un peu moins d'un an.
Et là... c'est le drame. Une peur incontrôlée de regrossir me submerge, mais une frustration accumulée me fait dérailler complètement. Je vais faire des crises de boulimie, trois fois par jour pendant plusieurs mois, tout en continuant à appliquer des règles alimentaires drastiques hors crises, pour compenser. Je refuse de lâcher ces règles absurdes, je m'y accroche. Entre temps, je quitte mon copain et je pars m'installer dans une autre ville ; tous repères chamboulés.
Mais au bout de plusieurs mois, arrivée physiquement et mentalement au bout du rouleau, pas loin de tout envoyer balader, je finis par me traîner chez une nutritionniste du gros (assez nulle mais toujours mieux que les ânes habituels). J'entame une RA, je me munis des bouquins du docteur Z et du psychologue A. Je me suis à ce jour débarrassée des crises, et je mange au mieux, en ne me privant pas et en écoutant au maximum ma faim. Je suis également suivie par un psychiatre pour des troubles borderline – sous prozac pendant un an, je suis actuellement en fin de sevrage.
Seulement, mon juste poids, dans ce corps malmené, est un poil plus élevé que celui que j'avais au début de ma RA. J'ai repris, un peu – globalement peu. Mais j'ai peur de la dynamique que ça peut prendre. La semaine dernière, sans rien de notable à part quelques repas où j'ai dépassé ma faim, j'ai pris deux kilos. J'ai peur – peur de redevenir grosse, peur de refaire des crises. Je refuse catégoriquement l'idée de me priver à nouveau, je sais que ça me serait fatal et que je reprendrais le cycle infernal des crises et des privations. Mais je me sens dans une impasse. Je veux accepter mon corps, même avec quelques rondeurs ; un corps avec lequel je fais globalement la paix. Mais il y a toujours ce démon quelque part qui me dit « Attention. Pour peu que tu n'écoutes pas ta faim quelques jours, tu vas reprendre. Et tu ne vas pas reperdre, car ton métabolisme est plutôt paresseux. » Je recommence à focaliser sur mes rondeurs, sur les parties de moi qui sont le plus « hors normes », à me dire... je ne sais pas, que ce n'est pas beau aux yeux des autres, qu'on me juge, qu'on ne va pas avoir la même attitude envers moi que si j'étais mince. En gros, moi je m'aime, mais les autres ? Les concepts de séduction, d'assurance, d'estime de soi, sont totalement chamboulés chez moi. Pourtant, je trouve appétissantes les filles rondes. Mais chez moi, ça me pose un problème. Et je ne sais pas trop comment faire pour me remettre à flot, pour me déstresser, pour m'accepter enfin, comme ça, ou avec dix kilos en plus.
Je me doute que personne ne va avoir de réponse miracle, mais j'aimerais bien votre avis, votre ressenti, votre vécu sur la question.
Merci de m'avoir lue :)