L'ADJECTIF
Gros, Grosse:adj, adv. est issu du latin impérial
grossus:"gros épais"(1er siècle) et "rude, grossier" en latin chrétien. Le mot est une altération phonétique -la voyelle o évoquant mieux la grosseur- et une spécialisation du mot
crassus"gras" en latin classique
Gros a pris comme dans les autres langues romanes les mots issus de
grossus un sens général de volume ou de dimensions importants (1080 aussi adv.
en gros"en grandes dimensions") en parlant de choses ou de personnes.
Il est immédiatement employé dans des comparaisons (1080)
gros comme "de dimension aussi importante que" puis "de la taille de"(1678-1679)
Il a pris par transposition(1er quart du 13ème siècle) une valeur acoustique"de volume sonore important"
Par extension il signifie "abondant".
Dans toutes ces valeurs,, la répartition d'emplois entre
grand et
gros est plus délicate que les interférences avec gras, réservées aux personnes (
gros et gras) et aux animaux.
Par extension gros se dit de ce qui entre dans la catégorie des choses importantes( fin 14ème le
gros gibier;1538
le gros bétail)
Au sens le plus général, plus proche de
grand, gros s'emploie (1225) avec une valeur amplificatrice au sens de "total, entier" pour renforcer un adjectif(1440-1475) puis pour renforcer l'expression d'une qualité, d'un état etc.(1661-1679)
Il prend spécialement la valeur de "foncé", intense" en parlant d'une couleur(1796)
Parallèlement,
gros se dit de ce qui est temporairement ou anormalement de dimensions importantes:
grosse au féminin signifie (1130-1140)"enceinte" d'où
grossesse et
gros ,grosse "enflé, gonflé" (v.1165,
mer grosse, milieu du 13ème
gros temps "tempête)
L'adjectif s'emploie aussi au sens figuré:
avoir le coeur gros(v1165) en particulier dans
être gros de d'abord "avoir envie de "(1450-1465 sens disparu) puis aujourd'hui, qui recèle en germe"(1549)
Au 17ème,
gros s'emploie au sens de "grossi pour impressionner"(1718
faire le gros dos;1784
faire les gros yeux; 1837
la grosse voix
L'adjectif a pris en outre une valeur affective ou ironique (1740
mon gros ami), il en reste l'appellatif
mon gros(1808 à un enfant) où il est substantivé.
Gros s'emploie depuis le début du 13ème au sens d'"important par sa situation sociale, sa puissance..."il est alors synonyme de
grand(
gros roi v.1210) de là l'emploi pour "important, intense"(V1274
grosse peine) "conséquent" (1280).
Si ces emplois ont vieilli, d'autres où gros a la même valeur restent usuels:
un gros travail(1306
grosse besogne),
le gros lot
"le plus important"(1690). A ce dernier emploi se rattache l'usage adverbial
gagner gros"gagner beaucoup"(1678)
Le sens spécial de rude est introduit au 12ème siècle(v1150
gros mot) Sauf dans
gros mot, cet emploi sera éliminé par le dérivé grossier(à partir du 16ème)
Au concret gros qualifie ce qui est "d'une consistance peu fine"(1174) et au figuré "sans finesse d'esprit"(v.1265)
Par extension l'adjectif correspond à "trop évident"(1269-1278) d'où plus récemment
c'est un peu gros
LE NOM
Gros:n.m. et
Grosse représentent l'adjectif substantivé. Au masculin
Grosn.m. désigne d'abord la partie la plus épaisse (1080
le gros de),puis
un gros(1er quart 13ème siècle)une personne corpulente et au figuré, une personne puissante, riche (
les gros emploi très vivant en langue populaire moderne)
Le gross'emploie en même temps pour "l'ensemble, le tout" (v.1265) puis pour la partie la plus importante(1531;1549,
le plus gros est fait)
Un gros a désigné une monnaie à cause de l'épaisseur de la pièce (v.1340 puis en 1606, un poids correspondant à celui de la pièce de monnaie.
Par emprunt au latin médiéval,
grossum, neutre substantivé de grossus, désignant le revenu annuel d'un bénéfice,
le gross'est dit d'une redevance(1379).
Du sens évaluatif de l'adjectif "sans finesse",
gross'est dit d'un tissu à gros grain (1391) d'où
gros de Naples: "sorte de taffetas épais (1586).
De la locution
en gros "en grande quantité" vient
commerce de gros(1704) qui s'oppose à
au détail
Grossen.f. s'emploie au sens de
douze douzaines(du sens de l'adjectif "grande quantité".
Comme terme de droit,
grosse désigne l'expédition d'une obligation notariée, dont les caractères sont plus gros que ceux de la "minute"(1464)C'est alors un emprunt au latin médiéval
grossa qui désignait des expéditions d'actes du pape Innocent III(deb.13ème) rédigées en grosse lettres
Paradigme morphologique: grossement, grossesse, grosseur, grossier, grossir, grossissant, grossissement, grossiste, grosso modo...