Ton message me ramène quelques années en arrière...
Je suis issue du milieu ouvrier, avec un père ouvrier métallurgique, une mère au foyer, des grands-parents/oncles plus chauffeurs routiers ou garagistes que banquiers ou profs...
Mes parents ont toujours accordé une énorme importance aux études de leurs enfants, sûrement dans l'espoir de leur offrir une vie "meilleure" à leurs yeux. J'ai toujours eu une pression énorme là-dessus, et c'est comme ça que, de fil en aiguille, je me suis retrouvée à faire mes études supérieures à Sciences Po Paris.
Là-bas, une majorité de jeunes issus de milieux très aisés, grande bourgeoisie voire noblesse, ou au moins de milieux intellectuels dits supérieurs. Je me suis très vite construite, à tort sûrement, car il y avait de bonnes personnes dans le lot, en rejet à cette population "chic et fric". Ma tendance un peu marginale/gaucho/anticonformiste s'est accentuée. Dès lors, un peu dur de s'intégrer...
Malgré tout, je suis tombée amoureuse d'un type, ou plutôt devrais-je dire d'un archétype :lol: , qui était l'essence même de tout ce que je détestais : en fin d'études à polytechnique (école à composante militaire), fils de grands bourgeois libanais, qui projetait de travailler dans le milieu de la finance. Sic!! :x
Et pourtant... Il y a comme on dit une faible distance entre ce qui vous attire et ce qui vous répugne. Je crois que tout ce luxe, cet argent facile, ces amis issus de la jeunesse dorée, insouciants... m'a tourné la tête. C'était à mille lieux de ce que je connaissais, c'était comme un rêve ou plutôt un fantasme qui devenait réalité.
Il est parti faire sa derière année d'études aux USA, à Stanford près de San Francisco. Et il me payait constamment des allers-retours pour aller le voir, en première classe. Là-bas, on faisait la route des vins en décapotable, on allait à des soirées dans des villas avec piscine à débordement, on ne mangeait qu'au resto... Ses amis étaient gentils, et j'arrivais à ne pas trop complexer en compensant mon absence de fortune par mon bagage universitaire. Et puis il ne leur semblait pas anormal qu'étant une femme, je me fasse entretenir par mon copain. (re-sic!!).
Puis mon petit ami est rentré en Europe et est entré comme trader chez Lehman Brothers, à Londres. J'ai arrêté mes études et l'ai suivi, aveuglée...
Et là, petit à petit, tout a tourné au cauchemar.
C'était d'abord des réflexions : "tu ne devrais pas t'habiller comme ça", "tu bois trop en soirée, ça n'est pas classe"... Puis il m'a reproché d'exprimer mes opinions, trop à gauche pour lui, lorsqu'on parlait politique en soirée (désolée mais moi, entendre "on devrait supprimer le chômage, c'est pour les feignasses", ça me tue :evil: ). Quand on faisait des soirées avec des boss de sa boîte, je devais être discrète, et surtout ne pas le contredire publiquement. J'étais là pour décorer en somme, pour faire potiche...
On partageait une grande maison à Chelsea, avec des amis à lui bossant également dans la finance. Certains étaient très gentils, c'est sûr... Mais ça ne parlait que d'argent, à longueur de temps... Cela m'insupportait... C'était le paraître, ce qui se faisait ou non, ce qui se disait ou non, ils pouvaient discerter des heures de l'âge idéal de une première rolex... :roll:
J'étouffais, car je me sentais dans l'incapacité d'être moi-même. Parce qu'à l'état brut, je n'étais pas assez raffinée, pas assez manièrée pour ce milieu. Je mettais les pieds dans le plat tout le temps. Disons-le franchement : je faisais pécore!
Et dans l'autre sens, ces soirées passées dans les boîtes branchées avec les potes qui revenaient de Dubaï pour le weekend et claquaient 1500€ de boisson dans la soirée, ça me donnait la gerbe... Ce copain de mon mec, vilain comme un poux, qui s'était trouvé une superbe fille en russie et l'avait ramenée pour l'entretenir, en l'exhibant comme un trophée...
Ca n'allait plus. Trop de différences. Il a fini par me quitter, et après coup, mon dieu je l'en remercie...
Enfin voilà, désolée, j'ai raconté ma vie là :oops: :oops: mais c'est que ton message m'a rappelé plein de souvenirs...
Ceci étant dit, je pense que le problème ne venait pas juste de notre différence de strate sociale, mais surtout du milieu dans lequel nous évoluions, celui de la finance, qui est franchement pourri, macho et vide de sens à mes yeux.
Je pense qu'un couple socialement "mixte" peut réussir, et j'ai moi-même des amis issus de milieux de grands bourgeois parisiens que j'adore, avec qui j'ai de grandes affinités.
Mais comme pour tout type de mixité (culturelle, religieuse...) je pense que cela peut être difficile.