nellifer75 a écrit:
pour le reste il y a des tas de femmes sur terre et je lui en souhaite une jolie et bien faite car il le mérite
ah ben ouais, sur, et puis surtout que quand on se traine le suicide de sa femme, on est en confiance pour en draguer une autre, refaire sa vie et tout, hein. Pis c'est vachement sympa cette petite minute d'angoisse quand tu rentres chez toi le soir et que tu te demandes si la nouvelle n'a pas fait comme l'"autre".
Pour info, quand même, j'ai eu il y a quatre ou cinq mois des nouvelles d'un collègue de mon tout premier boulot -même pas, de mon stage de fin d'études qui s'est transformé en premier boulot - et dont la femme s'est suicidé en 2002. C'était le gars génial, dont on se demandait ce qui pouvait l'abattre. Super inteligent, très mignon, marrant.
Ben apparement il n'a plus rien à voir avec le mec que je connaissais. La personne qui m'en a parlé m'a dit un truc du style "B? euh ben... tu sais". Ouais je sais.
Cela dit, on ne tente pas de culpabiliser quelqu'un qui veut se suicider par la description du malheure des autres, c'est nul et cela ne sert à rien.
J'avais écris ceci un jour :
Citation:Un matin vous ouvrez les yeux, le poil terne, la paupière basse, une chape de plomb sur les épaules et un crabe qui vous bouffe l’estomac. Pas moyen de se lever, on est si bien au chaud sous la couette, le nez dans l’oreiller. Cela faisait quelques jours d’ailleurs que vous étiez fatiguée. Vous avez peut être un cancer-le sida-une malade grave qui vous condamne – rayez-la-mention-inutile-s-il-y-en-a-une. De toute façon, vous ne manquerez à personne, personne ne vous aime. Si. Là. Enfin y’en a bien un ou deux qui vous apprécient mais jamais-au-grand-jamais à votre juste valeur. Tant pis pour eux, ils se rendront compte de la formidable personne que vous êtes lorsque vous aurez disparue. Tout comme votre chef, il défilera la larme à l’œil à vos funérailles, et déclamera les bras en croix que l’entreprise ne survivra pas sans vous. Bien fait. Une petite larme coule le long de votre joue tandis que vous imaginez avec nostalgie le défilé de personnes sanglotant devant votre tombe ouverte, jetant de majestueuses roses rouges sur votre dernière demeure.
Ne bougez plus, ça y est, vous y êtes, dans la belle, la grande, la véritable crise de misérabilisme. En avant pour le grand spectacle. Une chtite crise de sanglots dans l’oreiller, justifiée d’ailleurs, vous êtes au bord du gouffre, là, aujourd’hui à sept heures du matin et personne, je dis bien personne, ne devine à quel point vous allez mal et ne vous appelle. Ils doivent tous être en train de pioncer, ces monstres. Monde pourri.
Au bout d’un moment vous vous levez quand même. Un coup d’œil au miroir vous confirme l’atroce vérité que vous sentiez au fond de votre cœur : vous avez tout du gnou. Si si du gnou ! Regardez votre visage bouffi, votre nez pas droit, vos kilos en trop, le bouton sur le front. Un monstre, beurk. Vous en étiez sure, vous êtes gravement malade. Autant vous suicider tout de suite.
Vous jouez un peu avec l’idée, peaufinez les détails. Deux options :
(1) Vous mourrez seule dans votre appart et au bout de quelques jours sans nouvelles, un de ces monstres sans cœur qui ne vous aime pas à votre juste valeur viendra bien taper à la porte demander des nouvelles. Ne serait ce que votre copine Béa qui ne viendra sûrement que pour récupérer son précieux CD qu’elle vous réclame à corps et à cris depuis trois semaines. Pétasse égoïste qui n’a même pas été capable de deviner à quel point vous alliez mal, elle se retrouvera nez à nez avec votre pauvre cadavre allongé dans son lit, blanc, livide, froid, mais artistiquement arrangé. Style Juliette sur le corps de Roméo avec Roméo en moins. Elle commencera pas vous prendre doucement la main et tentera de vous réveiller. Trop tard, t’avais qu’à y penser avant, au lieu de me parler de ton succès auprès des mecs, de ton boulot formidable ou de la dernière superbe jupe dans laquelle tu rentres ton petit cul de serpent. Bien fait, gnark gnark gnark !
(2) Deuxième option : le spectaculaire instantané. Sauter sous le métro, tiens. C’est visuel, cela, ça jette. Vous imaginez la nouvelle qui se répandra à toute vitesse parmi vos connaissances. Ils se diront tous : « Mais elle avait l’air de si bien aller ! elle était si belle, si intelligente, si marrante !!! Pourquoi n’avons nous pas vu qu’elle allait si mal !! oh je m’en veux je m’en veux je m’en veux !!! ». Ils vivront tous dans le regret éternel de votre souvenir.
Mouais. Les deux sont pas mal. Mais vous avez le temps d’y réfléchir hein. Tiens, le temps d’aller acheter du lait par exemple. Vous vous sapez mal, ne vous maquillez pas, passez juste le coup de brosse superficiel qui amènera de l’électricité statique sur vos cheveux. Puisqu’il faut que vous sortiez, autant que votre aspect extérieur reflète votre désespoir intérieur. Vous vous traînez dehors. Personne ne vous regarde. Vous le saviez bien, que vous n’étiez pas belle, tiens ! PERSONNE NE VOUS REGARDE ! C’est sur cette fois vous allez vous ouvrir les veines.
Vous rentrez chez vous, en commençant la lettre d’adieu que vous allez laissez à ce monde pourri. Un truc qui jette quand même. Vous hésitez à mettre le nez de tout vos petits camarades égoïstes dans leur caca, en leur dédiant à chacun un petit paragraphe de reproches bien incisif, qui les plongera dans le remords pour le reste de leur vie, ou à donner des raisons plus classes, dans le genre je-ne-veux-plus-vivre-dans-un-monde-où-les-enfants-meurent-de-faim. Deux options extrêmes, mais vous avez pas trop le choix : en fait, vous êtes un peu embêtée vous ne savez pas trop pourquoi vous voulez mourir. Enfin si, vaguement, mais vous n’allez tout de même pas écrire « Je suis trop moche, trop nulle, trop grosse. Je n’en peux plus ». Ah non quand même ! D’abord, quand vous serez morte, ils se rendront compte de votre beauté, de votre intelligence. Alors si vous laissez un mot qui laisse penser le contraire, ils seront un peu paumés et cela gâchera la perfection de leurs regrets éternels.
Bref vous cogitez. Pendant des jours et des jours, peaufinant le lieu, la méthode, le texte. Ricanant intérieurement devant tous ces pauvres abrutis qui vous demandent où en est le dernier dossier, votre mère qui vous demande comment ça va, votre sœur et ses histoires de bébé. Parfaitement, vous ricanez ! Vous vous savez que vous allez bientôt mourir et eux ne le savent pas ! Ah, comme ils regretteront que votre dernière conversation n’ait pas été plus profonde, plus intellectuelle ou plus émotive que le dernier dossier, ou vos futurs neveux ou nièces.
Et, toujours cogitant, le temps passe.
Ce petit texte c’est du vécu. Le misérabilisme n’a pas toujours cette forme, c’est un exemple.
Analysons un peu la situation. Vous trouvez, vous, le lecteur anonyme, la personne qui a écrit ces lignes un peu ridicule, voire carrément insensée, non ??
D’abord, le désir de la maladie grave. Ben oui ça a plus de classe au final que le suicide. Mais bon c’est lent. Ben oui. Cependant si chaque personne un peu déprimée un matin avait une maladie grave, le monde n’existerait plus. Si, si. La probabilité pour que cela arrive est trèèèèès trèèès faible. C’est pas moi qui le dit, ce sont les statistiques.
Ensuite, ben si personne ne vous appelle un matin à sept heures, surtout un dimanche, c’est qu’ils pioncent effectivement. Ce ne sont pas des monstres pour autant, et vous devriez faire pareil. Eux en tout cas le pensent.
Maintenant le reflet dans le miroir. Il est vrai que certaines soirées de beuverie peuvent vous donnez une allure de phacochère au réveil. Si vous n’êtes pas sortie la veille, il est plus que probable que le reflet que vous voyez est déformé. Pas votre miroir, plutôt votre esprit. Ben oui, à part dans X Men ou dans les films de SF avec catastrophe nucléaire, il est peu probable de subir une transformation génétique "femme en gnou" en une nuit.
Maintenant le suicide. The big sujet. Plusieurs points à aborder sur ce thème :
D’abord, hormis quelques cas rarissimes, le désir de suicide est ponctuel. Et vi ! Les spécialistes, enfin certains, appellent cela la pulsion Thanatos, ou pulsion Thana de son petit nom. C’est à dire que le vrai désir de suicide en lui même ne dure que quelques secondes, voire quelques minutes pour les plus récalcitrants. Oui, je sais, cela ne vous semble pas vrai. Vous êtes tellement mal que le suicide vous obsède sans arrêt, Vous ! Et tous les suicidés enregistrés à l’heure actuelle aussi. Na. Ben non. Les suicidés ont cédé à la pulsion. Et vous, ben, faîtes une expérience et attendez. Vous verrez que ça passe. Je sais vous ne me croyez pas. Et puis vous ne voulez pas essayer vous êtes sur de vous. Comme vous voulez, mais on pourra toujours vous reprocher votre manque de curiosité scientifique.
Ensuite, le suicide en lui même. Réfléchissez un peu que la première méthode à laquelle vous avez pensée n’aura pas forcément les résultats que vous espérez. Ne serait ce que le fait que les quelques jours nécessaires pour qu’on remarque votre disparition aura eu son petit effet sur l’aspect esthétique – et odorant – de la scène sur laquelle vous misez tout. Il y a tout lieu de penser que votre copine Béa ne transmettra pas l’image d’un corps d’un blanc d’albâtre languissamment allongée à son entourage. On ne développera pas ce chapitre et vous renverra aux textes sur la putréfaction des corps.
Deuxièmement, mettez vous bien en tête que votre chef ne viendra pas à votre enterrement. Il a autre chose à foutre. Du reste, quand on lui a annoncé la nouvelle, il a, après une petite seconde de stupeur, aussitôt déclenché une réunion avec vos collègues pour re-dispatcher vos projets.
Enfin le regret éternel de ceux que vous aurez laissé. Si vous comptiez les observer de la haut ou d’en bas ou d’ailleurs pour vous régaler de leur désespoir et de leur remords, vous en serez pour vos frais. Vous leur manquerez c’est sur. Mais aucun d’entre eux ne s’enfermera dans un couvent au Tibet pour porter un silice et se flageller tous les jours à votre souvenir. Non, non aucun. Il est même probable que la plupart, vivant leur vie avec ses joies et ses peines, vous aient oublié au bout de quelques mois. Oh bien sur, ils se rappelleront de vous et en parleront sans doute avec tendresse, ou incompréhension. Mais ne vous attendez pas à être le sujet de conversation de tous les jours, passé un certain temps. Ce n’est pas leur faute, la nature humaine est ainsi qu’elle se tourne plutôt vers l’avenir que vers le passé – et ceux qui y sont restés.
Bref, le bilan de tout cela ? une bonne crise de misérabilisme de temps en temps, ça fait du bien. On se vautre dedans, bien au chaud, en s’y roulant dans les grandes largeurs. Et puis faut arrêter. Si si. D’abord parce que vous vous y emmerderez plus ou moins vite, selon votre imagination. Mais qu’il est probable que plus vous vous y enfoncerez et plus vous ferez le vide autour de vous. Ben oui. Votre air lugubre, votre voix morne, votre « non non tout va bien, je t’assure ! » cela intriguera un moment, et puis les gens en auront marre. Si vous voulez pas qu’on vous aide, on va pas vous forcer non plus.
Réfléchissez un peu de façon rationnelle. Cherchez pourquoi personne ne vous appelle en plein cœur de la nuit lorsque vous pleurez. Si si réfléchissez un peu la réponse va peut être vous parvenir.
Et cessez de penser à mourir. Si vous voulez vraiment emmerder les autres vivez, et faîtes les chier. C’est toujours plus stimulant pour tout le monde.
TheToad,
Docteur Es misérabilisme
A étudié plus de dix ans et pratique encore de temps à autre
Consultation sur rendez vous.
J'espere que cela t'aidera - ou pas. Mais pour ma part je vais arrêter ce post, je crois qu'en fait je n'ai pas envie de savoir quelle decision tu vas prendre, si tu en prends une.
Plein de bons conseils t'ont été donnés mais tu ne
VEUX pas t'en sortir, tu veux juste te venger, de tes collègues, de ces femmes, de ton mari, aussi, peut être, parce que tu dois estimer qu'il n'a pas été assez là pour toi, pour te soutenir, de toi aussi. Si tu estimes que c'est une raison suffisante pour mourrir... c'est ta vie.