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RA les références/ bibliographie? et des questions!

49 ans Paris 9874
_Aphasie_ a écrit:
(Chelou hein ? ;) )


Pas chelou, intéressant! moi aussi j'ai éprouvé un certain malaise à propos de ce concept... chez toi c'est quoi qui le motivait?  
tu te représentes l'hyperempathie comme une faiblesse? un défaut?
42 ans très au sud 7915
ah? je suis intriguée...
hypersensible ça je savais à mon sujet. pour le coup hyper empathie ça ne m'étonnerai pas.
pourquoi tu trouves cette caractéristique négative Aphasie?

Pour ma part je vie assez bien mon hypersensibilité, sans elle je ne pourrais pas créer les choses que je crée. alors j'accepte aussi son côté moins top (être capable de pleurer devant les infos...)
38 ans 3196
Non, c'est plus l'idée d'un "vide intérieur" comme cause de l'hyperempathie qui m'attriste. Je me reconnais assez dans les personnalités hyperempathiques atteintes, selon lui, du syndrome du "ni-ni" (se placer en contradiction avec les autres pour se forger un avis, difficulté à accepter la contrainte, évasion dans l'imaginaire, etc.). Jusque là je voyais effectivement ce trait de caractère (le goût pour la contradiction notamment) comme quelque chose d'assez positif, puisque je l'associais plus à de l'esprit critique.
Là, de l'expliquer par un "vide intérieur" préexistant, genre je n'ai pas d'opinion personnelle du coup je me réfugie derrière cette attitude – qui n'est pas vraiment une conviction intérieure mais plutôt une conséquence inconsciente de l'hyperempathie – ça rend le truc "moche" je trouve. Ca m'emmerde de me retrouver là-dedans, et pourtant le fait que ça m'atteigne m'interpelle sur la part de vérité que cette théorie peut porter.

Désolée, c'est brouillon, et les termes ne sont pas exacts, ça fait un petit moment que je l'ai lu.

Et toi ? quels aspects t'ont mis mal à l'aise ?
38 ans 3196
Attendez, je vais essayer de vous citer les passages du bouquin, car Apfeldorfer donne un sens très précis à l'hyperempathie. J'écris mon pavé et je reviens :)
41 ans 4079
Oui parce que je ne comprends pas trop ce que c'est l' hyper empathie du coup... :)
38 ans 3196
Donc Apfeldorfer fait le tour, dans son livre, des différentes théories avancées pour expliquer l'obésité (notamment psychanalytiques, psychologiques, ou psychosomatiques).

Puis il propose son analyse :

"Restent aussi à expliquer certains traits de caractère, certains comportements communs à tous ceux qui rusent avec plus ou moins de succès avec le surpoids : ce qui frappe chez eux est le constraste entre un surinvestissement dans le monde, "l'externalité" des comportementalistes, et une faible capacité d'insight correspondant à un "état fusionnel", des "limites du moi floues", une "confusion des émotions", une "alexithymie", pour reprendre les concepts psychanalytiques.
Il s'agit d'un double mouvement : le surinvestissement du monde va de pair avec la méconnaissance de soi-même. C'est ce surinvestissement que je propose de nommer "excès d'empathie" ou "position hyperempathique"."


Ensuite il explique bien que le rapport au poids est complexe, et que bien évidemment tous les obèses ne sont pas forcément hyperempathiques. Puis il relève les aspects positifs de l'hyperempathie (grande attention portée au monde), mais aussi l'un des inconvénients : l'hyperemptahique manque de recul par rapport au monde extérieur.

"(...) Dans un premier temps, le don d'empathie, en abolissant la distance qui me sépare de l'autre, me fait érpouver ce qu'il éprouve ; dans un second temps, il est nécessaire que je puisse examiner le sentiment perçu de mon propre point de vue. Ce que je viens d'éprouver en me mettant à la place de mon interlocuteur s'appelle de la tristesse? Mon vis-à-vis est donc triste. Il est probablement triste parce qu'il vient de perdre son grand-père. Je le sais parce que, dans la m^me situation, voilà ce que je ressentirais.
L'hyperempathique, très doué pour la phase identificatoire, peine ensuite à prendre de la distance. Il lui est donc difficile de nommer, catégoriser, porter des jugements. (...) Hypersensible, ressentant intensément le monde envirronant, percevant intuitivement les choses, il échoue en partie à les comprendre et à les ordonner. Captant les émotions des autres, leurs désirs, leurs opinions, mais incapable de s'en détacher, il s'y trouve comme englué et pris au piège. Sa difficulté n'est pas de comprendre les autres, mais de se situer par rapport à eux. L'attention de l'hyperempathique étant catée par ce qui lui est extérieur, ce mouvement l'empêche d'effectuer un retour sur lui-même. De fait, tandis que le monde du dehors est ressenti comme plein et captivant, le sujet se perçoit comme vide, irréel."

D'où : "la prise alimentaire remplit une fonction : celle d'un rétablissement de l'image du corps et du sentiment d'exister".

"La position hyperempathique, sur le plan clinique, pourra engendrer deux tableaux différents. Le premier, que nous appellerons syndrome d'envahissement, consoiste en l'état que nous venons de décrire. Le sujet, tout entier centré sur l'extérieur, s'identifiant un peu trop aisément aux autres, n'a qu'une conscience fugace et évanescente de lui-même. D'où une angoisse agoraphobique du vide, une grande dépendance par rapport au milieu extérieur et le vécu de cette dépendance comme un envahissement.
Le second, que nous nommerons syndrome d'opposition, ou syndrome du ni-ni, consiste en une position défensive, une tentative du sujet hyperempathique pour échapper à son état, se constituer une intériorité. Il met en place divers processus de défense, pour la plupart de type réactionnel. Pour se constituer une personnalité autonome, l'hyperemptahique, du fait de sa trop grande suggestibilité, développe des contre-choix. Pour séparer le moi du non-moi; il aura tendance à définir le sujet comme un anti-objet :"Puisque c'est cela qu'on désire que je sois, je serai donc le contraire."
Il s'agit d'une position proche de la claustrophobie, du refus de tout enfermement, d'efforts désespérés pour échapper aux définitions, classements, catégorisations, volontés, suggestions, influences et désirs de l'autre. C'est justement parce qu'il sait qu'il fait l'amalgame entre ses désirs et ceux des autres, se laisse englober par l'autre, que l'hyperempathique veille à ne pas se conformer à ce qu'il suppose qu'on attend de lui. Mais ce syndrome d'opposition ne se réduit pas à une attitude négativisme. etre systématiquement négativiste serait risquer d'être défini comme tel. Le ni-ni s'oppose donc bien souvent... à l'opposition. Ce faisant, il se voit pris au piège d'un jeu de miroirs conduisant à des positions pondérées, et auquel seule l'utilisation réitérée du paradoxe permet d'échapper."


(extraits : Gérard Apfeldorfer, Je mange donc je suis, Surpoids et troubles du comportement alimentaire, p. 198-205)

Voilà. Je n'ai retranscrit que quelques extraits, sa réflexion est bien plus riche et argumentée. Mais les concepts de base sont là.

Vous comprenez mieux pourquoi je trouve ça "triste", ou suis-je complètement parano ? :lol:
49 ans région parisienne 5831
C'est sûr que l'hyperempathie pourrait être vue comme une qualité (quelqu'un qui comprend les autres, qui sait se mettre à leur place, bref, quelqu'un d'altruiste), mais la façon dont l'explique Apfeldorfer le transforme en un défaut (soit un sujet vide qui se remplit des sentiments des autres, soit un sujet vide qui tente de se remplir en contredisant les autres).

Cela ne me parle pas trop, tout cela, je ne sais pas quoi rajouter, je ne m'y reconnais pas vraiment, d'ailleurs (mais c'est aussi peut-être parce que je pars demain en vacances et que du coup, j'ai du mal à penser à autre chose :lol: ).
42 ans très au sud 7915
Perso l'hypersensibilité me sert, pour la créativité donc. Mais aussi à cerner les personnes, capter certaines situations.
j'ai assez l'esprit de contradiction c'est vrai, mais justement je ne veux pas qu'on me dise ce que je dois être.
ce n'est pas parce que je suis une prof d'arts, une artiste que je dois être fofolle et m'habiller comme une hippie par exemple.

Et puis Apfeldorfer n'en est qu'aux débuts de sa théorie, elle se met en place et à mon avis il va la nuancer. de plus il est rare qu'un individu colle parfaitement à un profil, il y a toujours des nuances, des adaptations.

ah et pour quelqu'un qui devrait avoir beaucoup de mal à hiérarchiser, ben pour faire mes disserts & co il me faut avaler des tas d'infos et non seulement les hiérarchiser mais en plus les critiquer et opposer. Je passe mon temps à hiérarchiser les choses: quel élève fournir mon aide en prems, quel mail pro nécessite une réponse immédiate/rapide/plus tard/pas du tout etc etc...
50 ans à la maison ! 10072
mamykro a écrit:
soit un sujet vide qui se remplit des sentiments des autres, soit un sujet vide qui tente de se remplir en contredisant les autres).


ce n'est pas ce que je lis... je lis que l'hyperempathique "se perçoit comme vide, irréel"

Entre un sujet vide, et un sujet qui se perçoit comme vide (ou à peur de l'introspection de peur d'y trouver le vide), il y a... un gouffre, justement !
38 ans 3196
trashrap a écrit:
mamykro a écrit:
soit un sujet vide qui se remplit des sentiments des autres, soit un sujet vide qui tente de se remplir en contredisant les autres).


ce n'est pas ce que je lis... je lis que l'hyperempathique "se perçoit comme vide, irréel"

Entre un sujet vide, et un sujet qui se perçoit comme vide (ou à peur de l'introspection de peur d'y trouver le vide), il y a... un gouffre, justement !


C'est très juste, je n'avais pas vu la chose sous cet angle-là. Il explique aussi que ces sujets sont souvent très intéressés par la psychologie, la psychanalyse and co. Faut-il y voir un paradoxe, si ce sont des gens qui ont peur de l'introspection ?

Bref, il me tarde que tu l'aies lu Trashrap, j'aimerais beaucoup connaître ton avis.
35 ans Toulouse 130
Citation:
syndrome du "ni-ni" (se placer en contradiction avec les autres pour se forger un avis, difficulté à accepter la contrainte, évasion dans l'imaginaire, etc.)

Citation:
D'où : "la prise alimentaire remplit une fonction : celle d'un rétablissement de l'image du corps et du sentiment d'exister".

Citation:
Il explique aussi que ces sujets sont souvent très intéressés par la psychologie, la psychanalyse and co.

:shock: :shock:
C'est très dérangeant pour moi de lire ça, j'ai l'impression qu'on me titre le portrait... Et l'idée de prise alimentaire comme biais du sentiment d'exister me paraît très juste (me concernant, du moins) ; en plusieurs années de thérapie, je n'avais jamais envisagé ça.

Ça touche aussi à une de mes contradictions que je ne suis jamais bien arrivée à comprendre, d'ailleurs, qui est à la fois d'être très psychanalysante avec moi-même (analyse de ma subjectivité, de mes névroses, bref de tous mes "pourquoi du comment"), presque à un point compulsif, et à la fois désarmée face aux sensations fortes ou diluées, comme "engourdie", incapable de mettre des mots dessus.

Je crois avoir le bouquin dans un coin de ma bibliothèque, en plus, même si je n'ai pas pris le temps de le lire.
Je vais du coup y jeter un œil immédiatement.

... :shock:


... :shock:
38 ans 3196
Un peu comme toi Bouchecousue, j'ai été assez perturbée de me retrouver dans ce portrait. Je n'avais jamais songé à une telle hypothèse, même après trois ans de suivi avec un psychothérapeute et un psychiatre.

Lis les pages suivantes, qui font un portrait plus précis du "ni-ni", et dis nous ce que tu en penses !
38 ans 3196
en fait [mode "my life" on], j'ai été assez destabilisée, au début de ma psychothérapie, par la "neutralité" de la thérapeute. J'étais incapable de deviner ce qu'elle pensait, elle ne livrait rien d'elle. Du coup j'étais clairement mal à l'aise face à elle. C'est très étrange de n'avoir aucune prise sur quelqu'un.
Elle m'a expliqué, plusieurs fois, que ce rendez-vous était un espace pour moi, qu'elle était là pour m'écouter, quoi qu'il arrive, mais que tout venait venir de moi, que je n'avais pas à chercher une réaction, une approbation ou un désaccord de sa part. Elle m'aidait à réfléchir, sans jamais me donner de conseils.

J'ai mis du temps à le comprendre, puis peu à peu, le malaise a disparu, j'ai pu vraiment m'interroger sur moi même. Au final je trouve qu'elle a eu la bonne attitude, car elle m'a fait "sortir" en quelque sorte de cette position hyperempathique. En effet, Apfeldorfer explique bien que l'on n'est pas forcément hyperempathique toute sa vie. Il propose d'ailleurs de créer un espace d'écoute pour l'individu, pour débrouiller cette position hyperempathique.

Bref, j'en fait une lecture a posteriori, mais ça me semble intéressant. Ce qui m'attriste au fond, c'est de penser que j'ai pu ressentir ce "vide intérieur". J'ai de la peine, au final, pour l'enfant et la jeune fille que j'étais.

[mode "my life" off]
49 ans région parisienne 5831
mamykro a écrit:
soit un sujet vide qui se remplit des sentiments des autres, soit un sujet vide qui tente de se remplir en contredisant les autres).


trashrap a écrit:
ce n'est pas ce que je lis... je lis que l'hyperempathique "se perçoit comme vide, irréel"

Entre un sujet vide, et un sujet qui se perçoit comme vide (ou à peur de l'introspection de peur d'y trouver le vide), il y a... un gouffre, justement !


C'est vrai, tu as raison, je n'avais pas fait gaffe... C'est une nuance de taille, effectivement.

(bon, qu'est-ce que je fous là, moi, allez, hop, départ en vacances! :lol: )
50 ans à la maison ! 10072
Finalement, la RA est une forme d'analyse, j'ai l'impression (c'est sans doute pourquoi j'ai voulu commander les autres livres alors que celui de Zermati doit être suffisant en soit pour l'appliquer).
B I U